ANALYSE DE LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT

Déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) dans les zones industrielles de Bassa et Bonabéri : acteurs et stratégie de gestion

           Les équipements électriques et électroniques sont aujourd’hui des outils de travail indispensables dans plusieurs secteurs d’activités dans le monde. Ces équipements fonctionnent grâce à un courant électrique ou à un champ électromagnétique, et peuvent servir pour la production, le transfert ou la mesure des courants et champs.

Ils sont conçus pour être utilisés à une tension ne dépassant pas 1000 Volts en courant alternatif ou 1500 Volts en courant continu. En fin de vie, ils deviennent des Déchets d’Equipements Electriques et Electroniques (DEEE) ou déchets électroniques. Chaque année, 20 à 50 millions de tonnes de DEEE sont produites dans le monde (UNEP, 2009). Ce volume est en croissance rapide du fait des fréquences de renouvellement élevées, des modes d’utilisation et de l’innovation technologique favorisant l’obsolescence rapide. Dans le cadre de l’initiative StEP (Solving the E-Waste Problem) : résoudre le problème des e-déchets), le PNUE montre que la Chine est devenue la deuxième productrice de déchets électroniques au monde, avec 2,3 millions de tonnes par an, derrière les Etats-Unis qui en produisent 3 millions de tonnes (UNEP, 2009). En Afrique, il manque des données consolidées sur ce nouveau phénomène. Toutefois, le diagnostic dans certains pays montre une augmentation des DEEE du fait des systèmes de coopération et des donations en provenance des pays développés. Contrairement aux pays industrialisés qui mettent en place des filières de gestion des DEEE économiquement viables pour toutes les catégories d’équipements, la filière de recyclage dans les pays africains est largement dominée par le secteur informel, qui s’intéresse uniquement à la fraction des déchets présentant une valeur économique sur leur marché (Secrétariat de la convention de Bâle, 2011). Dans notre pays, la lutte contre la fracture numérique engagée depuis le sommet de l’information à Genève, en 2003, a entraîné l’augmentation d’équipements électriques et électroniques. Ces équipements souvent de seconde main deviennent rapidement obsolètes et augmentent ainsi les quantités de DEEE. En 2007, la quantité des déchets issus des ordinateurs et des téléphones portables était de l’ordre de 650 tonnes (Wone et Rochât, 2009). Selon ces auteurs, ce taux devrait dépasser les 2000 tonnes en 2015. Cette quantité, bien qu’étant révélatrice de la croissance des volumes de déchets électroniques, pourrait être sous-estimée du fait des stocks non déclarés dans les ménages, les magasins des services de l’administration et des entreprises, les ateliers des réparateurs et des recycleurs, mais surtout des importations frauduleuses de matériels électroniques. En plus des stocks non déclarés, la quantité de DEEE peut connaître des augmentations annuelles importantes car selon Brett (2009), le nombre d’équipements électroniques est fortement corrélé au Produit Intérieur Brut (PIB) du fait de l’utilisation des équipements de tout genre pour entraîner la croissance des secteurs moteurs de la croissance. Les déchets contiennent à la fois des composants toxiques (plomb, mercure, cadmium) et des matériaux de valeur tels que le plastique, des métaux de base comme l’acier, l’aluminium ou le cuivre, et de métaux précieux comme l’or, l’argent ou le palladium (Secrétariat de la convention de Bâle, 2011).

             Leur gestion mobilise divers acteurs du secteur informel. Cela pose le problème des circuits et de la traçabilité des déchets durant le processus de gestion. Les données collectées n’ont pas permis d’appréhender les interrelations entre les acteurs au niveau des zones industrielles de Bassa et Bonabéri et d’apprécier le niveau de connaissance des populations quant aux risques liés aux DEEE, compte tenu des niveaux de développement différents. Certains ont tenté de corriger ces écarts mais le caractère exploratoire de leur entreprise n’a pas permis de développer les aspects techniques du recyclage et de proposer un plan de gestion durable des DEEE. Les faiblesses des techniques de gestion ont motivé la détermination du profil des acteurs impliqués dans la gestion des déchets électroniques, d’analyser les circuits actuels desdits déchets et de proposer un schéma inclusif de leur gestion. Le circuit informel actuel des DEEE, les interrelations entre les différents acteurs, montrent un manque d’organisation dans la gestion des DEEE. Dans les zones industrielles de Bassa et Bonabéri, les importateurs/distributeurs peuvent être considérés comme la source initiale de production des DEEE. Ils alimentent les différents acteurs en appareils électroniques. Ils vendent leurs équipements respectivement aux ménages, aux sociétés privées, aux services de l’administration et aux entreprises publiques. Outre les appareils électroniques en bon état, ils mettent dans le circuit les appareils obsolètes participant ainsi de façon directe à la production des DEEE. Les déchets électroniques sont, en effet, jetés dans les poubelles ou les décharges sauvages d’ordures ménagères (16%), incinérés (1%), ou livrés aux recycleurs (30%), ou stockés dans les magasins (53%) en attendant de trouver une solution. Au niveau des utilisateurs professionnels et des ménages, les équipements hors d’usage sont soit donnés aux récupérateurs, ou aux réparateurs, soit jetés dans les ordures ménagères. Les utilisateurs constituent les principaux partenaires des réparateurs. Un taux de 94,9% de ces acteurs reçoit les articles venant des utilisateurs. Certains équipements sont restitués aux propriétaires après la réparation alors que d’autres sont soit stockés de façon sauvage dans les ateliers des réparateurs, soit jetés ou même vendus aux autres acteurs (recycleurs et récupérateurs) pour servir de matières premières. Une partie des équipements fournis aux réparateurs provient des récupérateurs (15,4% des équipements récupérés). Le travail des récupérateurs se limite, le plus souvent, à la collecte et à la commercialisation des produits issus des déchets. Etant au bout du circuit, les récupérateurs et les recycleurs procèdent principalement au démantèlement et à l’assemblage de composants divers pour remettre dans le circuit un équipement ou des matériaux recyclés au profit des ménages. Par ailleurs, pour ces acteurs, la décharge constitue un gisement important de matières récupérables capables de leur fournir des revenus substantiels. Ils remettent dans le circuit de l’utilisation les équipements recyclés et jettent les parties qu’ils ne peuvent pas valoriser.

              Donc, la gestion des DEEE dans les zones industrielles de Bassa et Bonabéri concerne beaucoup d’acteurs notamment, les importateurs, les distributeurs, les utilisateurs, les réparateurs, les recycleurs et les récupérateurs. Elle implique en majorité les jeunes et les hommes. Les interrelations désarticulées entre les acteurs montrent l’inexistence d’une filière organisée de gestion des DEEE. Malgré les efforts des personnes avisées, le stockage de ces déchets dangereux est pratiqué dans les ménages, les services de maintenance et de réparation ainsi que les entrepôts des structures utilisant les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC). Des pratiques informelles de recyclage sous-tendent une véritable économie circulaire qui se développe autour de la gestion de ces déchets dangereux dont les conséquences négatives sont exacerbées par le manque d’information des populations. En outre, plus de la moitié des acteurs n’a pas de connaissances sur les impacts des déchets électroniques. L’ineffectivité de la collecte sélective des déchets et le développement d’activités informelles de recyclage sont sources de pollution. Cependant, une organisation de la filière et une mise en place d’un cadre juridique spécifique aux DEEE pourraient aider à assurer durablement leur gestion écologiquement rationnelle.

                                                                                  Richard MEKONGO ONDOUA

                                                               Chef de la Cellule du Développement Durable

 

 

 

 

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